San José (Santa Clara County Fairgrounds) : 25 mai 1969

San José (Santa Clara County Fairgrounds) : 25 mai 1969


Titres :

1. Hear My Train A Comin'
2. Fire >
3. Drum Solo >
4. Spanish Castle Magic
5. Red House
6. I Don't Live Today
7. Foxy Lady*
8. Purple Haze*
9. Voodoo Child (Slight Return) > Room Full Of Mirrors > Message To Love Riff > Room Full Of Mirrors > Sunshine Of Your Love > Voodoo Child (Slight Return)

* Titres coupés

Sources :

- Do You Know The Way (ATM 146)



- Santa Clara 1969


"Hear My Train A Comin'" ouvre le bal : c'est une première. Contrairement à son habitude, Jimi fait son petit discours d'introduction sur la rythmique, et non avant de commencer le morceau. Le chant de Jimi est très convaincant : dommage qu'il soit à ce point en retrait. Le solo central est construit de façon un peu surprenante : Jimi fait complètement retomber la tension et joue des phrases très blues avec un son à peine saturé. Beau passage.

La version de "Fire" qui suit est particulièrement intéressante : elle ne ressemble à aucune autre.
Après le premier refrain, Jimi n'attaque pas le second couplet (il rencontre sans doute des problèmes de sono pour le chant), et se lance dans un long solo très rythmique en Ré - totalement inédit. C'est une longue improvisation où les passages en accords prédominent. Unique et passionnante : les incidents ont parfois du bon !

Les problèmes de sono (on entend un spectateur crier : "Branchez le micro !") obligent Mitch à se lancer dans un solo de batterie...

... suivi de "Spanish Castle Magic", dont le groupe propose une version assez brève. Le solo central débute sur des bases habituelles, mais continue avec des plans en octaves très intéressants. Jimi joue même un trait rappelant étrangement le "I Can't Wait Much Longer" du premier album de Robin Trower, où l'influence de Jimi est revendiquée. Trower connaissait-il ce pirate ?

La qualité audio est remarquable sur "Red House", dont les deux premiers couplets chantés sont splendides. Le chant de Jimi est impliqué, magnifiquement servi par des accords jazzy et quelques traits lead inspirés.
Le premier cycle du solo central est très blues, mais le titre bascule dès le deuxième, où Jimi joue avec beaucoup d'intensité, remarquablement soutenu par Mitch et Noel.
Lors du passage percussif, on distingue même les subtilités du jeu de Mitch - toms et cymbales.
Le dernier cycle est peut-être le meilleur : a capella, Jimi s'accompagne de sa seule wah wah. Mitch se plante en reprenant la rythmique des couplets : on entend clairement Jimi partir sur un autre cycle de solo intense (il veut en découdre !)... mais il se ravise et reprend le chant. Bonne version !

C'est l'ultime version du Jimi Hendrix Experience première formule d'un des titres les plus importants de son premier album : "I Don't Live Today". Lors de l'introduction de Mitch, les amplis de Jimi repiquent la radio... mais le phénomène s'arrête lorsqu'il joue.
Jimi est en forme vocalement. Il joue de superbes feedbacks lors du solo central, citant l'hymne américain sur la fin.
Le second solo comprend de nombreux passages complètement free fascinants.

"Foxy Lady" est dédiée à la "fille là-bas avec le sous-vêtement jaune... Ouais, toi, c'est ça !" : la fille en question est nulle autre que... Stevie Nicks, qui était morte de honte à ce qu'il paraît. Le solo de Jimi part bien, mais il semble rencontrer un problème technique (corde cassée ?). On en saura pas plus : la bande coupe à ce moment-là...

... et reprend au début du solo central de "Purple Haze". On peut le regretter car le groupe envoie bien.

Jimi casse un spectateur qui le prend pour un juke-box et lance "Voodoo Child (Slight Return)", dont la version dure plus de 20 minutes... avec quelques petites surprises.
Jimi rencontre quelques petits problèmes de justesse, mais ils sont généralement vite réglés. Le solo qui suit le second couplet comprend des passages très impressionnants.
Jimi joue ensuite un solo de percussion... sur la guitare, avant de se lancer dans un solo a capella dans un esprit similaire à celui qu'il joue à Woodstock (certains passages sont communs), très réussi d'ailleurs. Jimi semble conclure en reprenant l'introduction de "Voodoo Child" mais reprend la rythmique.
Il chante alors "Room Full Of Mirrors" sur le riff de "Voodoo Child". Il n'insiste pas trop : les tonalités sont sans doute trop éloignées pour que ça colle ("Room Full Of Mirrors" est en La), et il reprend un solo.
Mitch et Noel s'arrêtent : Jimi joue alors le riff de "Message To Love" (en Mi !) et lance une jam...
Jimi précise au public qu'ils sont cuits... et qu'ils se contentent de jammer.
Il lance alors le riff de "Room Full Of Mirrors", mais en La cette fois-ci. Il chante un peu et part en solo... puis attaque sauvagement le riff de "Sunshine Of Your Love" (en Si, comme d'habitude - alors que la version de Cream est en Ré) et part dans un solo assez original...
Il rejoue ensuite l'introduction de "Voodoo Child", très lentement (un peu comme à Woodstock). Il joue avec les dents... et termine ainsi le concert.


Au final ? Un très bon concert de l'Experience, qui sort des sentiers battus. Pour les collectionneurs, il est indispensable.

Pour Michael Fairchild, c'est tout simplement LE meilleur concert du Jimi Hendrix Experience. L'équivalent audio du visuel de Monterey.



Et il n'est pas le seul à le penser :

« The first time I saw Jimi was at the Santa Clara Fairgrounds in San Jose. It was probably the most incredible concert I ever heard in my life. I have never heard him play better after that. The show was absolutely incredible. Jimi was at the peak of his art, at one moment he would get caught inside a proton or a neutron and the next minute he would throw you to the Milky Way. I've never been exposed to that drastic form of expression. Somebody actually recorded it that day. I listen to it and I'm still blown away. You can hear all these waves of spirits crying through his guitar. We were like - 'Oh my God! How can he do this?' It was scary, I had never heard anybody express electric music the way he did that day. It was incredible to be assaulted with all these screaming winds. He would really control that instrument like a jazz player or a blues player would. It was like controlling a demon and making it sing. »

— Carlos Santana, In Straight Ahead, n° de juin 1994.


Toujours Carlos Santana :

« I saw him at Santa Clara Fairgrounds in San Jose in '69 but I didn't get to talk to him then - I still didn't know him. I think that was the best concert that I ever heard him play. He had supreme confidence that day. There was nothing in his mind about business of chicks or anything that I could tell because he just came out like Michael Tyson, when Michael Tyson would knock guys [out] in 3 seconds. There's a certain 'stance'. That's what Miles Davis said: 'I can tell whether a person can play just by the way he stands, you know.' He had a certain stance, man. He was all over that Strat and had supreme confidence, that's all I can say. »

— Carlos Santana, In UniVibes, n° du 17 février 1995.



La chronique du San Jose Mercury News du 26 mai 1969 est elle aussi excellente :

The king of rock held court here yesterday afternoon, sending nearly 20,000 of his subjects into stunned, delicious rapture...at the Northern California Folk Rock Festival at the Santa Clara County Fairgrounds...[Hendrix] belted out the blues sound that won him Billboard Magazine's artist-of-the-year title this year. He played it hard, soft, slow, fast, cooking and wailing up and down with a thunder beat that brought the entire audience to its feet surging to the stage...Thousands stood arms flung skyward, both hands flagging the "V" peace symbol...Hendrix did strange magical things to his followers. He just barley worked up a sweat singing and playing seven long sets, including his hit tune Purple Haze. 'I'm going on the road, make a pile of dough, come back and buy this town and put it in my shoe,' he sang. And with a few more performances like Sunday's Hendrix might not be kidding. Totally pacified, whether by pot, blazing sun, or the rumble of sound from what must be the largest outdoor stereo system ever assembled, the onlookers stood in rapt attention or jived in place...Most fans preferred just to savour each of the heady notes and cried out for more.

THE MERCURY - ‘Deafening Spell Woven by ‘The King of Rock’ by Rick Carroll:

“The king of rock held court here yesterday afternoon, sending nearly 20,000 of his subjects into stunned, delicious rapture. ‘Don’t waste our time worrying about bad things,’ Jimi Hendrix told the capacity audience at the Northern California Folk Rock Festival at the Santa Clara County Fairgrounds. The tall, slim, black guitarist-singer, clad in vibrant green shirt and violet trousers, for one hour and 20 minutes belted out the blues sound that won him Billboard magazine’s artist-of the-year title [last] year. He played it hard, soft, slow and fast, cooking and whaling up and down with a thunder beat that brought the entire audience to its feet surging the stage. Hendrix did strange magical things to his followers.
• A blond beauty shed her mini blouse and bare-breasted the throbbing vibrations.
• A black-faced deputy sheriff extracted a round from his cartridge belt and loaded the round into his stage- facing ears.
• Thousands stood arms flung skyward, both hands flagging the “V” peace sign symbol.
• One fan pressed his forehead on stage, just inches from the flying feet of Hendrix to sponge up the sound of the supersonic vibes.
‘The whole World is hip.’ Hendrix shouted as the crowd cheered. The king took a regal tithe in the coin of the realm - $30,000 in hard cash- and he just barely worked up a sweat singing and playing seven long sets, including his hit tune ‘Purple Haze’. ‘I’m going on the road, make a pile of dough, come back and buy this town and put it in my shoe,’ he sang. And with a few more performances like Sunday’s Hendrix might not be kidding. Totally pacified, whether by pot, blazing sun, or the rumbling of sound from what must be the largest outdoor stereo system ever assembled, the onlookers stood in rapt attention or jived in place. Some fans near the stage got caught in the crushing surge toward the stage, but no major injuries resulted. Most fans preferred just to savour each of the heady notes and cried out for more. ‘Hey man, we’re finished. We’re just jammin’. You all can do whatever you want to,’ Hendrix told his multitude before ducking off stage under heavy guard and fleeing in a long black limousine to San JoseMunicipalAirport. ‘Don’t stop for anything. said one of the guards, and the king fled his faithful followers. Hendrix’ appearance climaxed a three day sound extravaganza which drew an estimated 60,000 music lovers from all over California and as far away as Canada and Texas.”

Eh bien !

Enorme !