Stages - Paris 68 (1991) [CD2]1. Killin' Floor
2. Catfish Blues
3. Foxy Lady
4. Red House
5. Drivin' South
6. The Wind Cries Mary
7. Fire
8. Little Wing
9. Purple Haze
Le deuxième volume de "
Stages" propose l'intégralité du second concert donné le 29 janvier 1968 par le Jimi Hendrix Experience à l'Olympia.
Enregistré en mono à l'aide d'un matériel encore rudimentaire par Europe N°1, la qualité audio est nettement supérieure à celle de "Stockholm 67" en terme de dynamique. Mais sans être pour autant vraiment satisfaisante : les instruments ne sont pas toujours bien équilibrés, et la guitare de Jimi est parfois mixée trop en retrait.
Il y a aussi un certain nombre de temps morts (liés aux problèmes techniques) qui lestent inutilement une édition officielle.
On notera que la pochette de "
Paris 68" provient d'une photo du précédent concert donné à l'Olympia, le 9 octobre 1967.
La setlist présentée ce soir-là par l’Experience était assez originale, notamment en raison de sa tonalité blues : sur les cinq premiers titres, quatre sont des blues !
Après quelques traits de guitare legato joués a capella, Jimi lance sa fameuse introduction du "
Killin' Floor" d'Howling Wolf, sur laquelle Mitch Mitchell semble avoir du mal à se placer : il s'y prend à plusieurs reprises avant de rejoindre Jimi.
C'est une version radicalement différente de celle du festival de Monterey : le tempo est plus lent, et la tonalité globale moins urgente. Moins sauvage donc, mais pas inintéressante : les couplets, bien chantés, sont réussis.
L'écoute du solo central n'est pas des plus facile : on distingue de nettes variations du niveau relatif des instruments, conséquence plus que probable des réglages en direct de l'ingénieur du son d'Europe N°1. Le solo de Jimi semble plutôt réussi, habilement servi par les variations de ses accompagnateurs.
Jimi nous livre un court solo final dans une veine similaire.
Suit une des dernières versions de "
Catfish Blues" de l'Experience. Les couplets sont assez réussis, même si l'Experience jouait alors régulièrement des versions plus impressionnantes. Jimi n'est pas parfaitement accordé, mais ça reste supportable dans un contexte blues.
Il est intéressant de noter que lors de son premier solo, Jimi développe certains traits que l'on retrouvera ensuite sur "Voodoo Chile" (mais en moins puissants ici), véritable extension du "Catfish Blues" de Muddy Waters.
Après la reprise du chant, Mitch Mitchell se lance dans un solo de batterie plutôt nerveux, où il tire remarquablement son épingle du jeu.
Jimi enchaîne avec un solo à la wah wah, puis met véritablement le turbo en citant le "Cat's Squirrel" popularisé sur le premier album de Cream (le riff "Spoonful" est d'ailleurs effleuré en fin de morceau).
La bonne humeur de Jimi était manifeste ce soir-là : il s'amuse avec le public, y compris lorsqu'il se réaccorde, ce qu'il qualifie de "super titre" : le "Tune-up Time" !
Le groupe joue ensuite un "
Foxy Lady" efficace, bien lourd. Lourdeur qui convient parfaitement à ce titre, sorte de proto-Heavy rock... Le chant de Jimi transpire de bonne humeur ! L'ingénieur du son devait apprécier Noel Redding : ses chœurs sont mixés très en avant.
Le solo central est calqué sur celui de la version studio.
Jimi annonce ensuite "
Red House", dont c'est seulement la troisième version Live de l'Experience, avec "
Noel Redding à la guitare" : c'est a priori la seule fois où l'Experience reprend la formule de la version studio, où Noel Redding jouait la rythmique sur une guitare, et non à la basse. Noel racontera par la suite qu'il utilise ici une Les Paul Gold Top appartenant à Keith Richards. Le résultat obtenu n'est pas forcément des plus satisfaisants : le son de la guitare rythmique jouée par Noel est assez confus.
"Red House" est jouée assez "lourd" là aussi, dans un esprit très proche de la version studio. Seul Mitch Mitchell s'en écarte lors du solo, en jouant plus éclaté. Le tempo, que Jimi ne cessera de ralentir dans les mois à venir est ici assez rapide. Ce n'est pas une mauvaise version : Hendrix est rarement à coté de la plaque sur "Red House". Mais il lui manque clairement le petit plus qui fait toute la différence.
Le titre suivant est très intéressant : c'est la seule version connue du "
Drivin' South" (aka "Thaw Out") d'Albert Collins jouée en concert (les versions de la BBC constituent un cas à part : elles ont été enregistrées en studio).
Le mixage n'est pas terrible : la guitare de Jimi est trop en retrait. On profite certes du travail de Mitch Mitchell... mais sur ce genre de titre, la guitare DOIT être devant.
C'est regrettable : musicalement, il se passe vraiment quelque chose.
Vous noterez les similitudes entre le passage joué à partir de 2:20 par Jimi et la version studio de "Tax Free" qu'il enregistrera par la suite.
A 4:31, Noel Redding relance habilement la machine... Son jeu énergique se marie vraiment à merveille à celui de Mitch Mitchell. Et il a le son !
Quelques longueurs tout de même avant la reprise (7:34), même si le seul reproche qu'on puisse vraiment faire à cette prise est son mixage.
Hendrix déconne avec l'audience ensuite en annonçant une "Tune-up Song" suivie d'une courte parodie d'Elvis...
"
The Wind Cries Mary" comporte du très bon (le chant de Jimi est superbe)... et du très mauvais : les problèmes de justesse plombent littéralement son accompagnement. Et son solo est complètement raté.
L'énergie de "
Fire" est communicative : le mixage en retrait de la guitare passe mieux ici. C'est une solide version : le chant de Jimi est impeccable (et autrement plus agréable que celui de Noel, mixé très fort là encore).
Et Mitch est explosif… A un tel point que la peau de sa caisse claire rend l'âme, forçant le groupe à faire une pause, le temps d'en emprunter (puis régler) une autre.
L'introduction de "
Little Wing" est pénible : Jimi est complètement désaccordé. Comme sur "The Wind Cries Mary", il réussit l'exploit de faire abstraction des problèmes de justesse (ce qui est pour le moins difficile !) et chante très bien.
Des trois versions soundboard connues, c'est la seule où Jimi étend son solo sur trois cycles. Malheureusement, ce dernier est loin d'être inoubliable : Jimi n'a pas encore trouvé l'équilibre entre tension et lyrisme. Des différentes versions officielles, c'est de loin la plus mauvaise.
Après une introduction bruitiste qui ne décolle pas, Jimi joue le thème de "
Purple Haze" sur une Stratocaster totalement fausse. Aspect positif du mixage : les couplets de "Purple Haze" passent bien. Par contre, la sauce ne prend pas durant le solo. Le final bruitiste passe mieux...
La voix de Noel a rarement été mixée aussi fort qu'ici : on comprend pourquoi d'ailleurs.
Jimi termine le titre en gratifiant le public d'un final joué avec les dents : sur l'ensemble du concert, il semble pourtant avoir fait preuve de modération quant à son jeu de scène.
Au final ? Le second volume de "Stages" répond assez bien au projet original : c'est un concert honnête du Jimi Hendrix Experience, avec ses forces et ses faiblesses. Si les premiers titres du concert sont assez réjouissants, je suis plus réservé sur la fin, qui n'apporte rien à la légende du guitariste.
Malheureusement, le mixage du concert n'arrange rien : il est peu probable de voir un jour sortir officiellement "Jimi Plays l'Olympia". Et peu souhaitable.
On peut d'ailleurs s'interroger sur l'opportunité de publier un coffret 4 CD alors que les deux premiers volumes, les moins intéressants, tenaient sans problème sur un seul CD...