Lund (Stora Salen) : 10 septembre 1967 [Premier concert]
Titres :
1. Sgt. Pepper's Lonely Hearts Club Band
2. Foxy Lady
3. Catfish Blues
4. Fire
5. The Wind Cries Mary
6. Mercy, Mercy
7. Manic Depression
8. Purple Haze
Source : C'est un enregistrement audience d'une très bonne qualité au regard des critères de 1967. La distorsion est modérée, et la balance équilibrée : si Mitch Mitchell est un peu en retrait (son solo de batterie sur "Catfish Blues" est toutefois parfaitement audible), le rendu de la guitare de Jimi est très bon.
Après le concert du 5 septembre 1967 pour la radio suédoise (qui fera l'objet du premier volume de "Stages"), le Jimi Hendrix Experience livre d'autres concerts en Suède, qui ne seront malheureusement pas tous documentés. Le groupe se produit le 6 septembre à Västerås. Lors d'un entretien, à la question de savoir s'il joue de la musique pop, Hendrix répond que "ce n'est pas vraiment de la pop, mais si quelqu'un dit que c'est du rhythm and blues avec des racines à la fois pop et jazz", il sera sans doute aussi près que possible de ce qu'ils font.
A Högbo, le 8 septembre, l'Experience s'est produit devant un public clairsemé (seulement une centaine de personnes lors du premier concert !), faisant dire à Jimi que "ce n'est pas important si l'audience est réduite, je joue parce que j'aime jouer de la guitare, et j'évite de regarder mon public". Dans la setlist du groupe, il y avait "Catfish Blues" et "Foxy Lady".
Quant au concert du 9 septembre 1967, un chroniqueur en dira que "rarement aussi peu de personnes ont été responsables d'autant de bruit".
Les chroniques du concert du 10 septembre 1967 à Lund sont excellentes (Jimi est même comparé à Archie Shepp par l'un des auteurs) - ce qui est tout à fait justifié, au regard de l'enregistrement qui subsiste de ce concert, dont la première partie avait été assurée par Hansson & Karlsson, dont Jimi reprendra leur "Tax Free" par la suite.
Le concert s'ouvre sur un "Sgt. Pepper's Lonely Hearts Club Band" parfaitement exécuté - l'introduction idéale même. Ciselé, efficace, le titre montre la force de frappe du groupe.
"Merci beaucoup, c'était un petit morceau pour s'échauffer" précise Jimi avant de se plaindre de la qualité de ses cordes de guitare, puis d'annoncer une chanson de son album : "Foxy Lady". Le groupe continue sur sa lancée en produisant une version solide de la composition, Jimi l'interprétant à un tempo raisonnable.
Noel Redding annonce que le groupe va jouer un vieux blues. Jimi confirme qu'ils vont jouer un petit blues de Muddy Waters, "un joli petit blues bien propre", avec Mitch Mitchell à la batterie. La version de "Catfish Blues" suit en effet la trame des concerts scandinaves de 1967, avec un solo de batterie de Mitch. On devine clairement que le titre trouvera son aboutissement quelques mois plus tard sur "Electric Ladyland", avec "Voodoo Chile". Pour autant, c'est déjà le moment fort du concert, comme "Red House" le deviendra quelques mois plus tard. Les couplets sont très bien chantés par Jimi, qui pousse un peu plus sa voix que d'habitude. Il est intéressant de noter qu'à la fin du solo central, Jimi développe des éléments thématiques présents sur d'autres versions de cette tournée scandinave, profitant donc de ses improvisations précédentes pour construire son discours - ce que font de nombreux jazzmen.
A la fin du titre, Jimi se réaccorde et précise que c'est le moment du "Tune-up Time", un moment incontournable de son programme ! Pour autant, Jimi est très désaccordé et il rencontre des difficultés... Pour meubler, il plaisante un peu : "On fait très attention à vos oreilles... c'est pour ça qu'on joue si fort !"
Le groupe joue alors "Fire", renouant avec le feeling des deux premiers titres : énergie et efficacité sont au rendez-vous.
Noel annonce qu'ils vont jouer un de leur singles : "The Wind Cries Mary". Jimi se plaint de ses vieilles cordes avant de débuter le morceau - le fait est qu'il n'est pas juste et qu'il se limite au service minimum lors des couplets. Dans ces conditions, la version est correcte, mais pas inoubliable.
Jimi prend donc le temps de se réaccorder et annonce qu'ils vont jouer "une chanson du top 40 r'n'b" : "Mercy, Mercy". C'est un titre de Don Covay où Jimi intervient comme sideman sur la version originale. Pour plus détails : Don Covay & The Goodtimers : Mercy, Mercy / Can't Stay Away (1964)
C'est la dernière des deux versions documentées de ce titre joué par l'Experience, et elle est malheureusement très courte : les plombs sautent alors que le groupe est en train de l'interpréter ! Dommage : elle partait sur de bonnes bases.
Suit une superbe version de "Manic Depression", largement calquée sur la version de "Are You Experienced". Il est regrettable que la batterie de Mitch soit un peu enterrée sur l'enregistrement, car elle contribue largement à rendre "Manic Depression" à ce point original en 1967. Pour autant, c'est une version à connaître (il n'y en a pas tant que ça) car Jimi recrée avec brio l'incroyable climat du solo central.
Et nous en sommes déjà au dernier titre... mais quel titre ! L'Experience plombe en effet une version survitaminée de "Purple Haze" où l'énergie développée transcende les quelques imperfections rencontrées ici ou là. Après une courte introduction bruitiste, Jimi chante parfaitement les deux premiers couplets avant de se lancer dans un superbe solo, revisitant celui de la version studio avant d'exécuter de brillants développements. Le dernier couplet n'est pas moins fort, suivi d'un solo où Jimi se fait plaisir, avant de faire plaisir à son public, en terminant le concert avec ses dents !
Au final ? Une bonne cuvée 1967 servi par un enregistrement de qualité... Qu'attendez-vous pour le réécouter ?