Live In Maui (2020)
CD1 (First Show)1. Chuck Wein Introduction
2. Hey Baby (New Rising Sun)
3. In From The Storm
4. Foxey Lady
5. Hear My Train A-Comin'
6. Voodoo Child (Slight Return)
7. Fire
8. Purple Haze
9. Spanish Castle Magic
10. Lover Man
11. Message to Love
CD2 (Second Show)1. Dolly Dagger
2. Villanova Junction
3. Ezy Ryder
4. Red House
5. Freedom
6. Jam Back at the House
7. Straight Ahead
8. Hey Baby (New Rising Sun)/Midnight Lightning
9. Stone Free
Réactions à chaud :
https://jimihendrix.forumactif.org/t1730-live-in-maui-20-novembre-2020Je me permets une petite chronique, très subjective. C'est ici, après quelques écoutes en boucle, le simple point de vue de l'auditeur, du fan et de l'amateur que je suis :
On ne sait pas trop ce qu’a fumé Chuck Wein avant d’introduire le groupe. « Welcome cosmic brothers and sisters. […] The purpose of the humanity for being on this planet in the great cosmos in the multi universes… ». Il faut dire qu’il sortait de cinq années de collaboration –euh, psychédéliques ? - avec Andy Warhol.
Le premier CD démarre avec
Hey Baby (New Rising Sun), originellement joué en troisième position lors du premier concert. Pour ce qui concerne les raisons pour lesquelles l’ordre des morceaux diffère entre le concert et le CD je laisse des biens plus qualifiés que moi en discuter ; ma modeste théorie concernant ce titre mis en exergue est peut-être qu’il s’agit là d’une des toutes meilleures versions jamais jouées et enregistrées par Jimi Hendrix. Une autre raison pourrait être la qualité du son. Il a en effet bénéficié d’un re-recording en studio pour la batterie, ce qui rend la restitution des cymbales quasi impeccable. Ce ne sera hélas pas le cas pour tous les morceaux de ce double CD. Le fait est que l’on sent l’artiste en forme, ce premier solo coule facilement, la voix est claire, l’énergie est là, on sent que le concert va être riche.
Le titre est enchaîné littéralement avec
In from the storm, ce qu’il fut lors du concert. Même son que précédemment, la basse est nette, bien découpée. Mitch Mitchell semble totalement déchaîné, mais en réalité il est pleine possession de ses moyens. Les roulements sont ciselés, le break central introduit une seconde partie de morceau héroïque. Là aussi, grâce à l'overdub, le son de la batterie est digne des meilleurs enregistrements studio remasterisés.
Vient ensuite l’un des morceaux de bravoure traditionnels avec
Foxey Lady. On passe à la vitesse supérieure, les musiciens sont complètement chauffés, le morceau a en réalité joué en cinquième position. La qualité du son est peut-être un poil en dessous des deux morceaux précédents, mais on sent que l’équipe a bien retravaillé les bandes. La section rythmique est toujours aussi guerrière mais précise, tandis que Jimi assure une partie de guitare à laquelle on serait bien en mal de trouver un quelconque défaut. La prise de son de la voix pêche légèrement, mais l’ensemble reste très correct. Le « Thank you very much » de Jimi est enjoué, on le sent très à l’aise…
… D’autant plus à l’aise qu’il est désormais en condition d’interpréter
Hear my train A-Comin’ devenu à cette époque le blues « préféré » du trio, prenant en ça la place de
Red House (joué lors du second concert et présent sur le deuxième CD). Les fans qui connaissent tous les albums officiels trouveront que ce titre est un peu trop présent sur les productions Experience Hendrix. Pourtant, ici l’interprétation vaut pour l’attaque du solo dans lequel Jimi se plonge corps et âme. Sur le plan technique, le solo peut paraître un peu brouillon, mais il est joué avec les tripes, on n’y perçoit aucun automatisme, chaque note sort du plus profond de cette osmose que forment le guitariste et son instrument. Aux deux-tiers du morceau, un répit est accordé à l’instrument, laissant à la basse et la batterie soutenir tranquillement la reprise du chant, puis le groupe poursuit le voyage jusqu’à un final inattendu où tout s’apaise. Sans conteste l’une des plus belles réussites de ce premier album. Côté son on a un peu perdu par rapport aux premiers morceaux du CD. Il faut écouter raisonnablement fort pour s’immerger dans ce beau blues classique parmi les classiques de la set list du trio.
Sur le CD comme lors du concert le groupe enchaîne avec
Voodoo Child (Slight Return) qui vient juste après. Comme l’explique Ayler, il ne s’agit pas à proprement parler d’un blues comparable à
Hear my train A-Comin (pour des raisons de tonalité ?). Quoi qu’il en soit on a changé d’univers : le son de la guitare est hyper saturé, le solo est méchant, on croirait l’ambiance presque dangereuse, comme chargée d’une hargne. On est en présence d’un morceau de bravoure : qui aurait cru que ce
Voodoo Child si souvent interprété en concert et si présent sur les albums live puisse encore nous surprendre ? À l’image de Jimi, sa section rythmique – qui pourtant respecte à peu de choses près la partition originale – semble elle aussi chauffée à blanc ! Le morceau se termine par un petit solo de batterie qui assure la transition avec Fire.
Par l’effet quasi magique de ces roulements de caisse claire on est passé du ternaire de mid-tempo de
Vodoo Child au binaire rapide de
Fire. Le son s’est un peu dégradé, l’interprétation semble un peu brouillon. Ce n’est probablement pas la meilleure interprétation de ce titre désormais disponible sur nombre de disques live de cette tournée.
Pas de répit pour le trio qui se lance dans l’incontournable
Purple Haze. Là-aussi, le son un peu étriqué (un peu seulement…) ne rend pas totalement justice à ce classique interprété ici de façon assez académique : si l’on n’est pas surpris, on n’est pas non plus déçu. Côté solo, l’inspiration de Jimi baisse un tout petit peu à ce passage du concert et il se revient rapidement au riff principal. Le choix de respecter quasiment le format de la version originale studio de ce morceau ne laisse pas suffisamment d’espace à Jimi pour s’exprimer librement. Seule la fin où il esquisse quelques notes du Star Spangled Banner lui permet d’esquisser une improvisation.
Ici il y a une coupure nette sur le disque puisque l’on passe à
Spanish Castle Magic qui a introduit le premier set. La raison de sa position en fin de disque paraît très claire : le son est encore très brouillon, on est en début de concert, la balance n’est pas encore définitive, on semble terminer les derniers réglages du sound check. C’est peut-être le morceau qui offre le son le plus faible de ce coffret, ce qui ne lui rend pas justice parce que l’interprétation de Jimi est à la fois explosive et bien en place. Si la partie de Billy Cox est très simple et sans surprise (peut-être à cause d’un ratage en début de morceau ?), c’est surtout l’occasion de se chauffer pour Mitch Mitchell qui enchaîne les roulements à tout va. L’impression de sound check est encore renforcée quand on compare la mise en place légèrement approximative de l’intro avec la fin du morceau, bien mieux en place.
On continue avec un
Lover Man hyper rapide. Cette interprétation pose question : est-ce une préfiguration de l’ère punk et de ses morceaux de deux minutes et quelques ou bien est-ce que les musiciens veulent se « débarrasser » de ce morceau ? Pour ma part j’ai l’impression qu’ils terminent l’échauffement par cette petite composition très rapide et pleine de breaks pour se préparer à la suite du concert et entrer dans le vif du sujet.
Cette théorie est peut-être moins loufoque qu’il n’y paraît, parce que le morceau qui suit,
Message to love (joué à l’origine entre
In from the Storm et
Foxey Lady !) est selon moi presque parfaite même si elle ne réserve pas d’énormes surprises à qui connaît d’autres version live de ce morceau. Le son s’améliore un peu, la balance est terminée. La restitution du rendu d’époque n’est probablement pas trop mauvaise, à l’exception – évidemment ! – de la quasi absence des cymbales. Pour être tout à fait honnête, quand on se souvient du son des concerts en plein air de cette époque, on se dit que nos critères actuels de perfection sonore n’avaient pas encore cours. Et même avec un son vaguement étique, ce
Message to love se laisse écouter avec beaucoup de plaisir. Bilan du premier disque : son inégal avec de belles parties tout de même, quelques interprétations mémorables avec des solos ciselés… On attend avec impatience le second concert !
Le deuxième CD démarre avec
Dolly Dagger. Cerise sur le gâteau : les producteurs ont conservé l’ordre des morceaux joués sur scène. Les tâtonnements du premier concert semblent terminés, les réglages sont mémorisés, on devrait commencer le set dans des conditions de prise de son et de restitution un peu meilleures. Il faut être tout à fait honnête, ce
Dolly Dagger d’une interprétation très honnête n’offre pas le son attendu, pas plus que les morceaux qui vont suivre. Dans la mesure où les albums précédemment sortis par Experience Hendrix ont fait montre d’une remasterisation plutôt excellente, celle-ci ne peut être mise en doute. La seule explication valable est une prise de son à la console pour le moins perfectible.Je n’irai pas jusqu’à dire comme Ayler que cette prise soundboard est inférieure à une prise audience (surtout avec les moyens d’enregistrement dont disposait le public à l’époque), mais il doit certainement y avoir ça et là quelques contre-exemples. À vrai dire le son n’est même pas mauvais au sens propre, c’est plutôt la bande passante qui semble rétrécie : les basses manquent de sous-harmoniques, la batterie semble avoir perdu ses cymbales.
Une fois que l’on est accoutumé au son, on se concentre sur l’interprétation. Sans transition c’est un
Villanova Junction d’anthologie qui s’est joué ce soir là. Et pourtant la barre était placée très haut : le groupe évite l’écueil qui aurait consisté à reprendre le titre à la façon de Woodstock, et se lance dans une version dépouillée, presque bluesy. Que ce morceau est beau (et quel dommage pour le son…).
On en comprend pas très bien par quel miracle le son de batterie paraît meilleure sur le morceau qui enchaîne directement, à savoir
Ezy Rider. Après l’accalmie de
Villanova Junction, le tempo accélère. Le morceau est bien mis en place, la cohésion du groupe est excellente. Le public apprécie. Le son est presque bon – notamment parce que la partie de batterie a été enregistrée.
Après une très courte pause, c’est parti pour près de sept minutes de
Red House. Au départ le son de guitare est presque cristallin, la basse est assez bien restituée, et comme l’intro est très dépouillées, on entend assez bien la batterie (à part ces fichues cymbales dont on peut se demander si les micros n’ont pas été shuntés !). L’interprétation est classique, nette et sans bavure, la version est au final assez courte comparée à celle d’autres concerts.
Retour à un rythme plus soutenu avec
Freedom. Je ne sais dire pourquoi, je trouve que la partie de guitare (surtout la première partie) est l’une des meilleures jamais jouées sur ce morceau, un je ne sais quoi de… funky qui semble enthousiasmer la section rythmique si l’on en croit l’interprétation. Sur la lancée, le morceau aurait pu durer deux fois plus longtemps que l’on ne s’en serait pas plaint.
On sent que le groupe a envie de s’exprimer dans le
Jam Back at the House qui suit. Là aussi, passée l’introduction, le beat semble sorti d’une session funk façon Sly Stone. Vers le milieu du morceau, la batterie prend le leadership ; ce morceau assez rapide est plus technique qu’il n’y paraît – les batteurs n’auront aucun doute à ce sujet en écoutant Mitch Mitchell. Le morceau se caractérise aussi par de longs passages où la guitare et la basse jouent à l’unisson (à l’octave près, évidemment). La fin est un peu étrange, Jimi est absorbé, les notes s’écoulent avec une sorte de nostalgie qui contraste avec le départ épique du morceau.
On n’a pas senti la transition, mais on est déjà passé à
Straight Ahead. La partie de guitare est épurée mais efficace, carrée. Il faut dire qu’en trois minutes il n’y a pas de place pour un solo.
Et ce deuxième soir, le groupe nous gratifie d’une autre version de
Hey Baby (New Rising Sun), avec une intro très différente de celle jouée lors du premier set. Et là on se met à maudire le son devenu très pauvre, d’autant que le morceau est d’autant plus habité que son interprétation est assez sauvage.
Le disque se termine par un
Stone Free conduit à un train d’enfer par la batterie de Mitch Mitchell avec un petit pont (une « citation ») d’
Hey Joe et un final déchaîné. Est-ce une illusion ou une certaine lassitude de l’oreille ? Le son semble se dégrader au fur et à mesure que l’album se termine.
On peut grosso-modo diviser ce double album CD (triple LP) en trois parties de longueur inégale : la première moitié du premier concert bénéficie d’un son très honorable et d’une bonne remasterisation avec ses parties de batteries réenregistrés. La seconde partie du premier concert est un en dessous, non par les performances du groupe mais par la qualité sonore. Quant au CD qui couvre le second concert, il souffre hélas d’une qualité sonore un peu faible – tout de même supérieure à celle de bien des bootlegs d’époque – qui gâche un peu l’écoute et laisse l’auditeur un peu sur sa faim.
Comme le disait Ayler, ces deux concerts « bien remixés » auraient pu faire l’objet d’une sortie chez Dagger Records. En effet, on peut dire que ce double album vaut surtout d’être écouté par les fans mais qu’hélas, en l’état, il ne mérite pas mieux qu’une note de 2,5/5 à cause de ses faiblesses de prise de son sur la console. Quant à sortir ce double CD (triple LP) dans le « grand public »… Peu probable qu’Experience Hendix s’attende à de bonnes ventes.
Reste à savoir si le coffret complet vaut l’achat. La vision du Blu-Ray nous le confirmera, mais les premiers retours sur le forum évoquent une qualité d’image bluffante. Celle-ci arrivera-t-elle à nous faire avaler la pilule un peu amère d’un son qui potentiellement aurait pu être mieux retravaillé ?