Jimi Hendrix interviewé par Keith Altham a l'hôtel Cumberland le 11 Septembre 1970.
Avant le concert du festival de l'île de Wight, vous avez dit que si celui-ci se passait vraiment bien, vous continueriez pour un bon moment. Avez-vous été satisfait de votre prestation à l'île de Wight ?Je me suis senti si déboussolé là-bas et sur le moment si désorienté que je ne pourrais construire mon futur en fonction de ce seul concert – excepté le fait que j'ai joué « god Bless The Queen », si vous voyez se que je veux dire (rires)! Je ne pense pas que je puisse baser le reste de ma carrière juste a partir de ce boulot. J'étais vraisemblablement heureux d'avoir pu y jouer. Je me suis demandé si on allait leur plaire, ensuite bien évidemment je vais continuer et essayer de reprendre le dessus.
Maintenant que Billy Cox s'en n'est allé ?Oui! (rires)
Quoi qu'il advienne, vous avez donc besoin de trouver un nouveau bassiste?Oui, je crois.
Voulez-vous reformer un autre petit groupe ou vous diriger vers quelque chose de plus important ?Je ne saurais vraiment pas le dire, je crois que je vais reformer un autre petit groupe. C'est un choix difficile, j'aimerais avoir les deux si je pouvais. Par exemple en utiliser un pour les tournées, mais que je puisse parfois faire une tournée avec le grands. Mais cela dépend, c'est parfois très difficile de savoir ce que les gens veulent ici. Tout ce que je vais faire, c'est continuer et suivre mon instinct.
Mais en ce moment, je ne ressens plus rien, car il y a quelques trucs qui me sont arrivés, de sorte qu'il faut que je me relaxe et que je réfléchisse à tout ça.
Vous sentez-vous obliger de prouver que vous êtes le « Roi de la guitare », qui est l'étiquette que les gens vous ont collée?On raconte tellement de choses sur les gens que si ceux-ci en tenaient compte, ils ne seraient déjà plus de ce monde. Roi de la guitare ? Wow c'est un peu lourd...
Après le festival de l'île de Wight, et avant tout cela, tout le monde c'est mis a parler du « nouveau Jimi Hendrix », mature et plus sombre. Pouvez-vous nous parler des raisons et de l'origine de ceci ?Il y a eu une période pendant laquelle j'ai cessé de parler, parce qu'il m'est arrivé différentes choses ici et là. En fait, je ne sais pas vraiment. Peut-être qu'il y avait un autre sujet qui a fait l'actualité. Quoi qu'il en soit, je suis devenu pour un temps très calme. J'ai uniquement donné des concerts, je ne sortais pas, j'ai essayé de rester à l'écart. J'avais changé, je me sentais changer et aller vers un musique plus profonde. Cela devenait insupportable avec le trio. J'ai toujours voulu élargir ma démarche et tout ça, mais je crois que je vais maintenant revenir a la formule du trio. Et me trouver un autre bassiste, et se sera a nouveau bruyant (rires).
Mais on dirait quand même que la période des babioles, des bracelets et des coupes de cheveux folles est révolue. N'avez- vous pas peur que, d'une certaine manière, votre approche plus posée n'entame un peu la mystique qui entourait Jimi hendrix, et qui attira le public en premier lieu?Tout le monde passe par ces phases. Ainsi au début vous vous habillez avec tous c'est truc différents. C'est comme pour d'autres groupes comme Mountain, Cactus ou je ne sais qui d'autre, ils se mettent a ce genres de choses, on peut le voir actuellement sur les photos. Ils se laissent pousser les cheveux et portent beaucoup de bijoux, et s'étouffent avec toutes ces perles, ces bijoux etc. Mais je ne sais pas, j'ai juste fait ce changement car je me sentais trop bruyant. Ma nature évolue, vous savez.
Un journal publia une citation de vous, expliquant que vous n'aviez jamais voulu être un attraction visuelle.Je ne veux pas que les gens soit essentiellement excités par l'aspect visuel. Je veux qu'ils écoutent également. Cependant je ne suis pas sur qu'ils l'aient fait. Au bout d'un moment j'ai commencé a vraiment me rendre compte de ce qui se passait. Cela m'a un peu déprimé, si bien que j'ai commencé a me coupé les cheveux et a faire disparaître mes bagues l'une après l'autre (rires).
Etes vous en train de nous expliquer que le côté « freak » n'était en fait qu'une opération publicitaire ?Non ! Tout ce qu'ils ont fait, c'est me laisser faire ce qui me plaisait, mes propres petites scènes. Comme une fois ou j'ai dit « Peut-être que je devrais brûler un guitare ce soir, je me sens vraiment en forme ! » (rires) ou peut-être que je devrais foutre en l'air une guitare ou un autre trucs du style. Et ils disent « Oui, Oui ! » et moi j'ai dit: « vous pensez vraiment que je devrais le faire », et ils disent : « Oui, ça serait cool ! » Et donc c'est OK. Alors je m'énerve jusqu'au stade ou je suis capable de le faire. Mais je ne pensais pas beaucoup a tout le battage médiatique parce que ça me plaisait, voyez-vous, de porter toutes ces choses différentes. C'était fun. Et je continue à le faire, mais ça ma influencé de manière bête et stupide, au point de retenir mes désirs et tout le reste, pour une raison qui m'échappe.
La colère s'est donc un peu atténuée ?Oui, ça m'arrive toujours parfois. Mais je n'ai pas réalisé que c'était de la colère jusqu'à ce qu'on me dise que c'était ça – vous savez avec la destruction et tout ça. Mais tout le monde devrait avoir un pièce pour se débarrasser de certaines choses. Ma pièce à moi, c'était la scène.
Que va-t-il se passer maintenant? On a également rapporté dans un journal que vous aimeriez faire moins de concerts...Oui. Je crois que ce qu'on fait aura plus de valeur si on faits moins de concerts. On essaie en ce moment de mettre sur pied une tournée en Angleterre, et pour ça on aura vraiment besoin d'un bassiste.
Pensez-vous que les choses soient devenues moins excitantes ?Il me semble qu'une personne a tendance à s'ennuyer lorsqu'elle cherche toujours à réaliser pleins de choses. Comme commencer à travailler sur une idée ou une autre, et ne jamais la mener a terme. Eh bien on devrait laisser certaines personnes initier des idées et d'autres les accomplir (rires).
Mais je ne sais pas, c'est vraiment dur a dire a l'heure actuelle. On verra bien ce qui arrivera. Nous pourrions à nouveau faire des tournées avec un petit groupe, et prendre un autres bassiste. Je vais cependant probablement redevenir très sauvage, et me replonger à nouveau dans l'autre tendance, avec les coupes de cheveux, les trucs visuels et le reste (rires).
Vous avez dit à un journal que vous appréciez Pink Floyd. Qu'est-ce que vous admirez chez eux ?Ils font un autres styles de musique. Ils font une sorte de trucs plus spatial – je parle d'espace Intérieur. Et aussi, au niveau technique, ils s'investissent dans l'électronique et le reste.
C'est juste.Oui, parfois vous vous isolez pour vous relaxer et apprécier leur musique. J'aimerais rendre la mienne un petit peu plus facile, avec un meilleur rythme, un rythme consistant, plus de rythme.
Vous semblez partagé entre l'idée de réunir un grand groupe, dans lequel vous pourriez vous mettre en retrait, et une unité plus réduite, plus rock'n'roll, où vous pourriez projeter votre propre identité musicale. Est-ce réellement un problème pour vous ?Je ne sais pas. En ce qui concerne le trucs du rock'n'roll, tout le monde passe par là : c'est l'idée de penser qu'on va perdre des amis, alors il se peut qu'on veuille se remettre à nouveau ensemble d'une façon similaire, avec juste un meilleur rythme et plus de musique.
Serait-il pratique pour vous de réunir un pianiste et un vocaliste afin que vous puissiez prendre du retrait en tant que guitariste ?Oui, C'est ce que je me suis dit. C'est exactement ce que je veux faire. Tout ce que je veux, c'est avoir deux guitares, moi y compris, un clavier,un chanteur, une batterie bien sur et un basse. Si je pouvais obtenir quelque chose du style, ça serait extraordinaire.
Je me souviens avoir parlé il y quelque semaines à Alvin Lee de Ten Years After, et il a dit a votre propos que vous n'aviez pas vraiment été apprécié ou analysé en tant que songwriter. Pensez-vous que votre image ait un peu empêché cela ?Non.
Ressentez-vous comme un manque le fait que votre travail d'auteur-compositeur n'ait jamais vraiment été analysé ?C'est probablement une bonnes choses, car j'essaie de mettre les choses au point. Tout ce que j'écris, c'est juste ce que je ressens, c'est tout. Je ne peaufine pas trop. Je laisse les choses presque nues. Vous savez, peut-être que les mots sont si fades et vides qu'ils ne veulent pas forcement rentrer en matière. Et quand nous jouons, nous faisons des cabrioles et sommes exubérants, et donc ils ne vont percevoir rien d'autres que ce que voient leur yeux – ils oublient leurs oreilles. Et donc j'ai essayé de faire trop de choses en même temps, c'est ma nature. Mais je me suis fait plaisir, et je me fais encore plaisir rien que d'y penser.
Mais encore une fois, vous...Je déteste être confiné. Je déteste être seulement considéré comme guitariste, ou alors juste comme compositeur ou seulement comme danseur de claquettes ou quoi que se soit d'autre (rires). J'aime simplement être dans les parages.
Est-ce important pour vous d'être considéré comme auteur-compositeur?Je ne sais pas trop. Je pense que ça le serait si je voulais juste me relaxer, surtout écrire des chansons et ne plus faire de scène.
Vous auriez dit que ce que vous faisiez vous était égal, tant que cela excitait les gens. Est-ce vrai ?Oui.
Mise à part votre musique, à quel sujet aimeriez vous intéressé les gens ? Y aura-t-il un contenu moral ou politique dans les choses que vous aimeriez écrire ?Je ne sais pas, j'aimerais que leur esprit soit un peu plus léger, car il y a trop de chansons lourdes ces temps-ci. La musique est devenu trop lourde – presque au point d'en être insupportable. J'ai ce petit proverbe : « quand les choses deviennent trop lourdes, appelle-moi hélium, le gaz le plus léger que l'on connaisse. » Et Cependant...
D'où provient actuellement l'inspiration de vos chansons, vers quelles directions vous tournez-vous ?Je ne sais pas... De mes expériences récentes (rires).
J'essaie de regarder les choses dans leur globalité et de donner aux gens l'autre moitié. Car il y a d'abord la première moitié des choses, et ensuite viens dans un deuxième temps l'autre moitié – la solution, quoi qu'elle puissent être. Il y a d'abord le vécu et l'usage que l'on peut faire de tout ça. C'est comme si j'avais essayé de vivre de nombreux changement, pour qu'ensuite je puisse écrire les meilleurs moments de tout ça. Mais actuellement cela me prend beaucoup de temps (rires).
Vous avez dit que la musique serait...Devrait être du classique.
Non... Vous avez dit que nous étions a la fin de quelque chose et que l'étape suivante de la musique populaire allait changer le monde. Pensez-vous vraiment cela, ou croyez-vous que la musique est le reflet du monde ?Vous avez un autre genre de musique qui essaye de débarquer. Ce n'est pas forcément ce qu'on appelle de la Sunshine Music, mais c'est une chose plus facile, avec moins de mots et plus de sens. On n'a pas besoin de chanter continuellement à propos d'amour pour donner de l'amour aux gens. On n'a pas nécessairement à exhiber ces mots d'amour en permanence. Mais je ne sais pas, peut-être que j'ai dit cela car je me sentais affable et enthousiaste sur le moment (rires). Attendez un Instant ! Je ne peux pas revenir là-dessus, car j'ai une idée sympa. Je pense qu'il n'y a pas de raison pour lequel cela ne pourrait pas arriver, si c'était organisé comme...
Voulez-vous faire ceci vous-même, je veux dire...Je veux y contribuer.
Voulez-vous changer le monde ?J'aimerais certes y contribuer, mais pour changer la réalité, pas forcément celle que je connais, mais de façon a ce que nous vivions mieux ensemble, que les jeunes et les vieux cessent de se battre à ce point.
Quelle choses aimeriez-vous voir changer ?Je ne sais pas, peut-être qu'il y ait plus de couleurs dans les rues. Je ne sais pas Ce qui doit arriver devrait avoir un chance d'être connu de tous. S'il y a une nouvelle idée, une nouvelle invention, un nouveau gaz, quoi que ce soit de nouveau, une nouvelle manière de penser, ceci devrait être respecté pour son caractère novateur et également en tant qu'opportunité de changement honorable, ou en tant qu'apport de l'humanité. Au lieu que nous continuions a traîner les mêmes vieux boulets. Et il faut être « freak » pour être différent, vous savez. Et même les freaks ont de nombreux préjugés. Vous devez porter les cheveux longs et parler d'une certaine manière pour traîner avec eux. Pour être avec les autres, il faut avoir des cheveux courts et porter des cravates. On essaie de faire émerger un troisième monde, vous comprenez ? (rires).
Il y a des gens comme John Sébastian, qui veulent changer le monde, n'est-ce pas ?Oui.
Leur intention est de rendre le monde meilleur.Vraiment ?
Ressentez-vous le même besoin ?Oui, je pense qu'il faut que tout cela viennent de l'intérieur. Je crois qu'une personne devrait changer elle-même afin d'être un exemple vivant de ce quelle chante. Afin de changer le monde, vous devez d'abord avoir bien fait le point avec vous-même, avant de pouvoir dire quoi que ce soit au monde pour le changer.
Je pense que certaines personnes perçoivent surtout votre musique comme une musique en colère...Non, ce n'est pas ça...
En colère peut-être contre les figures de l'establishement qui...Ce n'est pas qu'elle soit en colère – si ça ne tenait qu'a moi, l'establishement n'existerait même pas. Je pense que cela n'est rien d'autres que du blues, je ne chante que cela, du blues aujourd'hui.
Avez-vous des opinions politiques ?Pas vraiment. Je me préparais à me lancer là-dedans mais a nouveau tout le monde passe par cette phase. Vous savez, cela s'exprime dans ma musique la plupart du temps. On n'a cette chanson « Straight Ahead » qui dit : « Pouvoir au peuple, liberté de l'âme, transmets cela aux jeunes comme aux vieux, et on se fout que tes cheveux courts ou longs, la communication arrive en force ». Ce genre de choses.
Avez-vous eu des problèmes avec les Black Panthers aux Etats-Unis ?Des problèmes ? Non. Il y a beaucoup de choses politiques qui ont lieu et dont il faut vraiment que je m'éloigne car sinon je me retrouve cantonné dans une case. Et ensuite, si j'avais quelque chose a dire, je le dirai a tous le monde, plutôt que de dire une petite chose donnée – je me trompe en disant une petite chose, mais une...
Vous a-t-on demandé de joué un concert pour les Panthers ?En effet ils nous l'on demandé, et j'étais heureux qu'ils l'aient fait, j'étais honoré. Mais nous ne l'avons pas encore fait. Mike Jeffrey s'occupe de cet aspect des choses, si bien que je ne sait pas si nous le feront un jour.
Avec le recul, que pensez-vous aujourd'hui de chansons comme « Hey Joe », sur un plan musical ?Je pense qu'elles sont pas mal. Je n'ai aucun regret, si ce n'est que j'ai dû sans le vouloir écouter quelqu'un d'autres ou quelque chose. En plus, les musiques sont plus vieilles que nous. Je ne les ramène pas a moi, je les vois juste comme des changements.
On dit de vous que vous aviez inventé la musique psychédélique.(rires). Une approche de savant fou. !
Comment le prenez-vous ? Considérez-vous comme exact que votre musique était à l'origine , ou que vos premiers morceaux étaient...Prévus pour des choses psychédélique ?
Ecrits dans un but psychédélique ?Vraiment pas, je dois être honnête « Are You Experienced ? », j'ai entendu cela récemment, et je me suis dit : « Bon sang, je me demande ou j'avais la tête quand j'ai dit tout ces choses. » Mais je ne considére pas avoir inventé la musique psychédélique, je pose juste beaucoup de questions. Je dit juste : « attendez une minute, excusez-moi une seconde pendant que je m'occupe de ça. Ensuite vous avez envie d'aller vers de nouvelles zones qui vous sont inconnues – comme le font la plupart des gens curieux, et je n'ai fait que mettre cela sur « Purple Haze ». Mais en ce qui concerne la manière dont j'écris, j'écris surtout en confrontant la réalité et l'imagination. Vos devez utiliser l'imagination pour montré différents aspects de la réalité, c'est de cette manière qu'on peut la modifier.
Vous ne vous percevez donc pas comme un auteur psychédélique ?Je pense que ça me correspond peut-être plus que tout le reste. J'essaie de m'intéresser plus fortement à d'autres choses, où la réalité n'est rien d'autre que la manière de penser de chaque individu. Le thème de l'establishement a également une part importante, et l'église d'Angleterre et tout le reste.
A quel point est-ce...Oui?
Non, désolé, allez-y...Non allez-y...
J'allais dire: que reste-t-il du Jimi Hendrix Experience d'avant, ou de billy Cox et de Mitch Mitchell, je veux dire....Vous parlez de l'aspect psychédélique ?
Je veux dire, combien d'albums et de morceaux restent encore a venir, et que peut-on attendre de votre nouvel album ?Je crois que cela va s'appeler Horizon. « Entre Ici et l'Horizon », ou quelque chose lié a ça. Et cela abordera certains sujets comme « Room Full Of Mirrors » (« Une Pièce pleine de miroirs »), qui relèvent plus du troubles psychiques que ce qu'on pourrai penser a priori. Cela parle de verre brisé répandu partout dans mon cerveau, et ainsi de suite. On n'en a une autre intitulée « Astro Man », qui parlent d'avoir l'esprit en paix. « Astro Man » vous taillera en pièces ! Et aussi « Valley Of Neptune Arising ». Mais toutes celles-ci sont-elles psychédéliques ? Je ne comprends même pas ce que ça veut dire. Cela veut-il dire qu'une chose en signifie une autre, un trucs comme ça ? Ou arriver à obtenir trois significations différentes à partir d'une seule chose ? C'est cela ?
Je pense que pour la plupart des gens le terme psychédélique est associé au LSD.Vous voulez dire uniquement au LSD ? Ce genre d'états de conscience ?
Oui, avec le rêve...Ah, d'accord ! Il faut donc leur en donner un petit peu pour qu'ils se mettent a rêver, afin qu'ils puissent écouter à nouveau, car ils seront sans doute dans un autre état d'esprit... Les rêves viennent des différents états d'esprit, vous savez. Ce ne sont rien d'autre que des états d'esprit.
Une des autres choses que vous avez dites récemment, c'est qu'à l'avenir votre musique pourrait être influencée par des gens comme...Johan Strauss.
Ou WagnerOh Oui ! Lui il me plaît.
Et Strauss, je voulais dire.Je pense, à la façon dont vont actuellement les choses, que la maturité prendra du temps. Mais au niveau de la spiritualité et dans ma tête, c'est toujours là, et cela s'améliore constamment. Un de ces jours, je vais finalement sortir tout ça. Mais au train ou vont récemment les choses, je pense que cela va prendre encore beaucoup de temps (rires). On n'avait un genre de petit Bolero, c'était chouette, qui ensuite se décompose en une structure très simple, qui pose la question toute simple du lieu d'où l'on vient et d'où l'on va. Et ensuite il y a une petite fille qui répond. Mais ça ne fait pas réellement partie du grand mouvement général que j'aimerai lancer au sein de la musique.
Voulez-vous travailler avec des orchestres symphoniques ?Oui, Il faut que je m'engage selon ma propre démarche, car je veux avant tout m'en tenir a mes propres jugements. Il faut donc que je respecte ma propre horloge, si je m'investis dans ces choses. Lorsque je vais finalement le faire, le monde entier en entendra parler.
Cela se rapproche des « mixed medias ».Exactement ! Qu'est-ce qui peut bien être plus universel que ça ?
Mais le côté négatif que les gens attribuent aux « mixed medias », c'est que les gens avec lesquels vous mélangez vos matériau ont tendance à ne pas être sur la même longueur d'ondes que vous...En tant qu'individus ?
Si vous ne les emmenez qu'à moitié dans votre musique, ils ne feront pas le reste du chemin vers vous. Et Les musiciens classiques...[/b]
Ah, je vois. Je n'ai pas l'intention d'en faire quelque chose de rigide. J'aimerai que chaque pas soit un mélange du passé et du présent.
[b]Oui.C'est de tout façon ainsi qu'est notre musique, mais là, ce serait encore plus le cas au niveau technique. Mais je comprends ce que vous voulez dire. Je n'ai pas l'intention d'y aller avec un orchestre de 90 musiciens et jouer deux heures de musique classique. J'ai en tête que les deux choses soient utilisées, le rock et le classique sans même que l'on puisse identifier qu'il s'agit de rock et de classique, que cela devienne un nouveau genre totalement différent.
Vous avez un peu parlé de l'importance du visuel, de l'importance d'avoir un film dans votre musique. Pensez-vous au jour où nous pourrons glisser une cassette sur le côté de notre téléviseur et jouer de la musique en même temps qu'un film ?Oui. Je pense à une époque où les gens gagneront beaucoup plus d'argent aujourd'hui, et lorsqu'ils emménageront dans leur appartement, ils auront toujours une chambre supplémentaire. Et vous entrerez dedans et vous n'aurez qu'a vous relaxer et la pièce entière se remplira de couleurs et de sons. C'est un peu comme une pièce consacrée a la destruction où l'on pourrait se lâcher, ou une pièce pour le thé où l'on entrerait boire du thé. Vous pouvez y entrez et vous débarrasser de vos tensions. Et cela marche avec une cassette. Vous branchez votre star préférée, et tout à coup la musique et la scène visuelle se mettent en place. Et en plus de cela les concerts, avec ce nouvel appareil, seront sûrement des expériences audio-visuelles. Il n'y aura probablement que 5000 personnes lors d'un concert, car nous voulons avoir un dôme comme une géode, et arranger le truc de manière parfaite. Cela prendra probablement une semaine pour arriver en ville, en train ou autre. Il faudra s'y rendre en train et ensuite il faudra entre un et trois jours environ pour mettre l'ensemble en place. Et à l'intérieur la performance aura lieu pendant les trois jours suivants, juste pour un public limité qui y entrera. Je pense que se sera extraordinaire. Car alors on pourra travailler et l'effet sur les gens sera bien plus intense que de mettre un grand écran derrière soi.
Qu'en est-il des grands festivals ? Pensez-vous, comme ont dit beaucoup de gens, que le festival de l'île de Wight soit le dernier des grands festivals ?Je ne sais pas pourquoi ils essaient constamment de tuer les festivals. Le festival de l'île de Wight était génial, les gens s'y baladaient dans le tumulte, s'appréciant les uns les autres, alors même que c'est à l'île de Wight, où il n'y a pas beaucoup de mélanges de différentes origines. La seule critique que suscitent les festivals ne vient pas des gens eux-mêmes, mais d'autres personnes qui ne peuvent pas comprendre l'idée de mélanger tant de gens d'origines différentes au nom de la musique, de la paix et de l'amour. Parce que c'est complétement différent de la configuration qui prévalait pendant la deuxième guerre mondiale, ces pays étaient tous les uns contres les autres. Maintenant on les réunit tous grâce à la musique.
Il semblerait qu'une faction très militante, avec des motivations politiques, soit maintenant impliquée dans ces festivals. Comme les maoistes Français...Toute nouvelle civilisation au sein de laquelle vous vous impliquez, ou que vous voyez grandir, toute nouvelle civilisation doit avoir ses propres officiers, sa propre police, ses propres gouvernements, donc ça n'est pas vraiment politique. Vous prenez juste le meilleur de toutes les politiques, de toutes les religions, de tous les pays. Vous faites juste le meilleur que vous pouvez avec cela, et en attendant cela nous sommes juste obligés de nous rassembler dans des patûrages (rires).
Mais ces gens qui se sont rendus au festival de l'île de Wight ont demandé à ce que la musique soit gratuite et que les festivals...Ah oui, ils ont appris cela des journaux. Comment se fait-il qu'ils n'ont pas fait ça à Monterey ? Ils n'ont pas fait beaucoup de bordel à Monterey. Les festivals ne devraient pas chercher a obtenir des foules aussi importantes. C'est un grand délire d'ego à l'heure actuelle : « 500 000 personnes sont venues. Wow ! C'est super ! » 500 000 personnes, c'est bien plus que la population d'une ville moyenne, par exemple en Angleterre. Et dans chaque ville du monde, il y a un gang, un gang de rues, des parias. Alors, avec 500 000 personnes, c'est cela que vous allez avoir. C'est une vraie ville que vous avez. Donc vous allez avoir ceux qui entrent sans payer. Vous allez avoir l'autre côté de toute chose. Tout cela, c'est la responsabilité des gens. S'ils veulent que ça continue, ils continueront. Si ce n'est pas le cas, alors ils se mettront seulement a apprécier la musique. Mais on ne peut pas vraiment se balader dans une salle de concert de rock. Vous souvenez-vous de l'époque ou nous faisions des concerts dans des théâtres ? On ne peut pas vraiment socialiser et se mélanger.
Mais ne trouvez-vous pas que d'une certaine manière, quand le truc devient si énorme, la musique devient secondaire ? Quand il y a 500 000 personnes...Oui, c'est sûr !
...qui viennent vous voir et ne pourront probablement pas bien vous entendre ?Oui, je comprends ce côté des choses. Ce n'est pas seulement la musique, mais les artistes, les grands noms et le reste, amènent les gens sur place. Mais tout le concept, c'est que les gens s'apprécient, se rencontrent et de se mêlent à des gens différents. C'est groovy. C'est pour cela qu'il devrait y avoir plus de choses dans les festivals. Ils ne devrait pas seulement y avoir de la musique, mais aussi du théâtre, des choses à vendre, du cirque...
Des freak showsOui, vraiment. Liberté au Danemark ! Slurp !
Que pensez-vous du prix des billets de concerts ? Je sais que vous avez exprimé votre préoccupation au sujet du prix que les gamins devaient payer pour vous voir aux Etats-Unis. Mais en même temps, j'ai cru comprendre que vous organisiez vous-même la plupart de vos concerts aux USA, et j'aurais pensé que vous pouviez fixer les prix...Non, pas vraiment, pas de la manière dont les gens l'organisent. Les organisateurs nous ont expliqué qu'il doivent vendre les tickets à un certain prix pour couvrir des choses et d'autres. Vous comprenez. Mais tout ce qu'ils m'expliquent à moi, ce sont des choses différentes que je ne comprends pas vraiment.
Mais vous pourriez sûrement vous retournez et dire : « Si vous demandez six dollars ou un montant du style pour voir Jimi Hendrix, je ne jouerai pas ! »Oui, je pourrais faire ça, mais il y a des contrats, tout ce vous devez parfois signer, et des engagements que vous prenez. En ce qui concerne le prix qu'ils exigent, vous n'avez parfois même pas l'occasion de l'examiner. Tout ce que vous pouvez faire, c'est exprimer votre opinion à ce sujet et espérer que ça se passera mieux la prochaine fois. Je crois que c'est pour cela qu'ils prennent si longtemps a organiser une tournée en Angleterre, pour réaliser une économie au niveau des prix, entre nous et les promoteurs. C'est toujours si cher, vous savez.
Quel serait pour vous un prix raisonnable, pour jouer par exemple devant 10 000 personnes ?Combien serais-je payé, ou combien coûterait le billet ?
Quel serait le montant d'un cachet que vous considéreriez comme raisonnable, pour vous et votre groupe, si c'était un trio ?Hmm... Pour 10 000 personnes ? Je ne sais pas, c'est assez dur a dire, je pourrais peut-être dire combien les gens devraient payé pour entrer.
Et se serait combien ?Disons 1,50 dollar, je pense. Combien paient les gens ici lorsqu'ils se rendent a un concert ?
Je pense que ça dépend où l'on est assis.Jusqu'à quel prix cela peut-il monter ? Jusqu'à 12 shillings ?
Deux ou trois livres.C'est fou. Sa va aussi longtemps que cela reste à moins de 10. Je pense qu'ils ne devraient pas monter à plus de 10 shillings. Car, après tout, ce n'est que de la musique, et les gens doivent payer deux ou trois fois ce prix pour acheter le LP.
Que pensez-vous du concept de la musique gratuite ? Des concerts gratuits ?Sa me plaît, sa me plaît vraiment.
Mais pourriez-vous y jouer ?Nous devrions. Il n'y a aucune raison pour que nous ne le puissions pas. Nous devrions seulement recevoir assez pour pouvoir payer les frais nécessaires pour nous rendre d'une ville a la suivante, faire ce genre de choses. Car nous avons le temps, il n'y a pas de raison de se presser. Parfois les gens impliqués dans la musique, ceux qui se tiennent de l'autre côté du business, veulent vous mettre dans ces situations de précipitation où vous n'avez le temps de répondre a rien. Mais nous pourrions le faire, il n'y a aucun raison qui nous empêche de jouer gratuitement ici. Nous dépenserions beaucoup d'argent si nous devions payer pour tout, comme la location de la salle. Mais si nous pouvions réunir assez d'argent pour que les gens paient tous ensemble pour le théâtre, et notre transport, et notre hôtel, ce sont juste des frais. Ce seraient tout ce qu'ils auraient a payer, et donc le prix des tickets baisserait nettement, ainsi ce serait gratuit, ce serait sous forme de donation.
Pensez-vous avoir maintenant assez d'argent pour vivre confortablement, sans forcément devoir encore en gagner en tant qu'artiste professionnel ?Je ne pense pas, pas de la manière dont j'aimerais vivre, car je veux pouvoir me lever le matin, rouler du côté de mon lit dans ma piscine d'intérieur, et ensuite nager jusqu'à la table du petit déjeuner, en sortir pour prendre l'air et un verre de jus d'orange. Et ensuite me laisser tomber de la chaise dans la piscine et nager jusqu'à la salle de bain pour me raser et le reste.
Voulez-vous vivre confortablement ou dans le luxe ?Est-ce que c'est du luxe ? Je pensais à une tente, surplombant une rivière de montagne ! (rires).
(Source : Hendrix - l'Enfant Vaudou (collectif) [2010] aux éditions Consart)